Quelques 700professionnels de santé ont signé une pétition¹ revendiquant la mise en place d’urgence d’une mission parlementaire sur l’opportunité de la vaccination contre le cancer du col de l’utérus, arguant de l’absence de preuves de son efficacité, de son coût particulièrement élevé et du risque d’effets indésirables graves. Explications.
Plus de 700 professionnels de santé ont signé une pétition contre les vaccins anti-HPV.
Le Plan Cancer 3 entend favoriser la vaccination contre le cancer du colEn France, chaque année, 4 000 femmes sont touchées par le
cancer du col de l’utérus et 1 000 en décèdent. Les Papillomavirus humains (HPV) de type 16 et 18 sont responsables de 70 à 80 % de ces cancers. Un
frottis régulier permet néanmoins de détecter la présence de lésions précancéreuses et de mettre en œuvre une prise en charge efficace, empêchant leur développement jusqu’au stade cancéreux. Le frottis cervical reste à ce jour le meilleur moyen de prévenir le cancer du col utérin.Mais depuis 2006, une
vaccination contre ces souches virales est proposée. Deux vaccins (
Gardasil ®, développé par Merck et distribué en Europe par Sanofi Pasteur MSD, et
Cervarix ®, laboratoire GSK), a été largement promue par leurs laboratoires respectifs auprès des médias, des médecins mais aussi et surtout des autorités de santé. Aujourd’hui, le calendrier vaccinal actuel recommande la vaccination contre le papillomavirus
entre les âges de 11 et 14 ans, pour les jeunes filles n’ayant pas entamé leur vie sexuelle, avec une session de rattrapage jusqu’à 19 ans pour celles qui auraient échappé à cette vaccinationLors de la présentation du Plan Cancer 3, le Président de la République François Hollande a ainsi affirmé que “ce vaccin a fait la preuve de son efficacité“, manquant de faire s’étrangler bon nombre de professionnels de santé… Malgré cela, le plan Cancer 2014-2019 prévoit une action volontariste concernant cette vaccination : “Sur la durée du Plan, la France se donne donc pour objectif dans un premier temps d’atteindre une couverture vaccinale de 60 % et d’expérimenter l’acceptabilité d’une vaccination en milieu scolaire pour augmenter ce taux de couverture“1.Pour cela, il est ainsi prévu d’inciter les médecins traitants à promouvoir cette vaccination en l’introduisant dans les rémunérations sur objectifs de santé publique, de renforcer la communication vers les jeunes filles et les parents, de promouvoir la diversification des structures de vaccination (centre de vaccination, cdag, ciddist…), d’autoriser la vaccination par les infirmier(e)s diplômé(e)s d’État1.Une pétition en ligne contre les vaccins anti-HPVPour la pneumologue Irène Frachon (la première à avoir tiré la sonnette d’alarme dans ce qui allait devenir l’affaire
Mediator), le médecin-blogueur Dominique Dupagne et 700 autres professionnels de santé, les déclarations du Président ont été la goutte d’eau qui a fait déborder le vase.Ces derniers ont donc lancé une pétition en ligne2 pour réclamer la mise en place d’une mission parlementaire sur l’opportunité de cette vaccination. Plus de 500 médecins et plus de 200 sages-femmes avaient signé à la clôture de la pétition, le 30 mars 2014. Tous étaient d’accord pour estimer “que les conséquences de la vaccination des jeunes filles sont inconnues et que son efficacité reste à prouver“, que son efficacité tous virus confondus chez les 16-23 ans est de moins de 20 % selon le Haut Conseil de Santé Publique, “que la présomption d’effets indésirables graves n’est pas à négliger“, et enfin, “que ce vaccin est particulièrement cher et qu’il constitue une dépense extrêmement onéreuse pour l’Assurance Maladie“.S’il peut apparaître séduisant de prévenir une maladie mortelle à l’aide d’un vaccin, de nombreuses voix se sont élevées dès la sortie des deux produits, dénonçant l’absence d’études prouvant son efficacité à prévenir le cancer du col de l’utérus. La Haute Autorité de Santé (HAS) elle-même partageait ce point de vue en 2007, indiquant que “l’efficacité en termes de prévention des cancers du col n’est pas établie“ et que “l’intérêt de santé publique attendu est modéré“.Sans parler du coût exorbitant dénoncé par la Cour des Comptes – 123 € le vaccin Gardasil, 111,52€ le Cervarix -, qui plombe les comptes de l’Assurance Maladie, du risque d’effets secondaires et de celui de faire reculer le frottis.Autre argument avancé par les signataires de la pétition, le risque de voir les femmes se détourner du frottis cervical, “conséquence d’un sentiment de protection qui se révèle en fait illusoire“. Or, contrairement au vaccin, le frottis a fait la preuve de son efficacité dans le dépistage des lésions précancéreuses, ajoutent-ils.Le député Gérard Bapt alerte l’ANSMLe député de la Haute-Garonne Gérard Bapt a rencontré, le 27 mars 2014, le Pr Dominique Maraninchi, directeur général de l’Agence nationale de Sécurité des Médicaments (ANSM), pour demander “une expertise indépendante sur la base de données transparentes“. Dans un courrier3 qu’il lui a remis au lendemain de cette rencontre, il rappelle les alertes lancées dans plusieurs publications médicales quant aux risques de cette vaccination : augmentation du risque de
syndrome de Guillain-Barré par rapport au vaccin antigrippal et multiplication par 26 d’effets secondaires entraînant un handicap (revue Vaccine) ; effets secondaires affectant majoritairement le système nerveux central et les maladies auto-immunes, comme l’indiquait une étude publiée dans les Annals of Medicine en 2013.Il réclame par ailleurs “la plus grande prudence dans les prises de décisions de l’élargissement des recommandations de vaccination anti-HPV“, conformément au précepte médical “primum non nocere“ (“Avant tout, ne pas nuire“).Les autorités sanitaires se veulent rassurantesDe son côté, comme le rapporte le Journal du Dimanche4 dans son édition du 30 mars 2014, le laboratoire Sanofi Pasteur MSD réfute toutes ces critiques, s’appuyant sur le soutien des agences sanitaires mondiales qui reconnaissent le bénéfice du Gardasil. Toujours selon le JDD, ces agences sanitaires et les gouvernements auraient subi un lobbying intense de la société pharmaceutique américaine…En France, le Haut Conseil de la santé publique a inclus cette vaccination dans le calendrier vaccinal dès l’âge de 11 ans. Une stratégie validée par la Haute Autorité de Santé. Six ans après un premier avis, en mars 2013, la HAS précise que le service médical rendu par Gardasil “est important dans la nouvelle population recommandée par le Haut conseil de la santé publique (HCSP) dans le calendrier vaccinal en vigueur dans les indications de l’autorisation de mise sur le marché (AMM)“. Elle conditionne cependant cet avis à l’obtention d’une couverture vaccinale suffisante : “En conséquence, si cette couverture n’atteignait pas l’objectif requis malgré les nouvelles recommandations émises, la Commission pourrait être amenée à reconsidérer à moyen terme (dans un délai de 3 ans) l’appréciation du service médical rendu des vaccins anti-HPV“. Elle précise également qu’à ce jour, l’efficacité en termes de prévention des cancers du col reste inconnue, tout comme la durée de la protection croisée au-delà de 3,6 ans.De son côté, dans son rapport mis à jour en juin 2013, le Comité consultatif mondial de la sécurité vaccinale de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) précise, dans le chapitre correspondant à la mise à jour sur les vaccins contre les papillomavirus humains, que “pendant les 4 dernières années, les données d’innocuité ont continué de s’accumuler à mesure que les pays lançaient et étendaient leurs programmes de vaccination“.Les vaccins contre les papillomavirus font l’objet
d’une surveillance renforcée par l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) et des mesures ont été prises aux niveaux national et européen pour évaluer les effets indésirables, les effets sur la femme enceinte ou encore le développement de pathologies auto-immunes. Selon le dernier
bilan de l’ANSM datant de fin 2011, “1 672 cas d’effets indésirables ont été notifiés, dont 352 cas graves depuis la commercialisation jusqu’au 20 septembre 2011“, soit un taux de notification de 38 pour 100 000 doses de vaccin distribuées et un taux de notification des effets graves de 8 pour 100 000 doses. Selon l’ANSM, “ce bilan est proche des données publiées dans d’autres pays et ne fait pas apparaître de signal particulier“.Compte-tenu des questions en suspens ainsi que des enjeux économiques et sanitaires, les autorités sanitaires pourraient être amenées à repréciser leurs positions et à éventuellement les revoir.Amélie Pelletier et David Bême
Sources
1 – Plan Cancer 2004-2009 (
accessible en ligne)2 –
Pétition pour la mise en place d’une mission parlementaire concernant le Gardasil.3 – Copie du
courrier du député Gérard Bapt adressé au Pr Dominique Maraninchi, directeur général de l’ANSM, en date du 28 mars 2014 (téléchargeable en ligne).4 – “
400 médecins contre un Gardasil “inefficace“ et “trop cher““, Article du JJD, édition du 30 mars 2014.